Journée internationale des filles : « Avec internet, elles peuvent commencer à défendre leurs droits

Les inégalités de genre s’étendent-elles au numérique ? Dans le monde, les hommes ont 21 % de chances supplémentaires que les femmes d’« être connectés à internet ». Un chiffre qui passe à 52 % dans les pays en développement, d’après la World Wide Web Foundation. Sans téléphone, sans ordinateur, sans connaissances technologiques, un certain nombre de femmes n’ont pas accès à l’outil d’émancipation que peut représenter internet. Il permet par exemple aux jeunes filles de s’informer sur leurs droits ou d’échapper aux assignations de genre des parents et aux normes sociales.
Directrice du plaidoyer de l’engagement des jeunes pour l’ONG Plan International, Michelle Perrot a récemment rédigé le rapport « Pour une éducation inclusive des filles et des jeunes femmes au numérique ». Une publication qui résulte d’une étude menée sur 26 000 filles dans 32 pays de tous les continents. En ce lundi de Journée internationale des filles dédiée à la fracture numérique, elle explique à Libération en quoi l’accès à internet est un levier essentiel d’affranchissement et d’indépendance.
Existe-il un fossé numérique entre les filles et les garçons ?
Les inégalités d’accès à internet sont très fortes dans les pays en développement, car les filles vont moins à l’école pour des enjeux économiques. Elles sont souvent déscolarisées entre le primaire et le secondaire, aussi parce qu’elles sont mariées très jeunes. Et on les encourage moins à s’affirmer que les garçons. Cette question de l’accès au numérique n’est que le reflet de tout ça. En France, on peut dire qu’il y a un accès quasi-égal, la fracture existe surtout entre zones rurales et urbaines. Mais de manière générale, les filles sont moins connectées.

En quoi l’accès à internet permet aux filles de s’émanciper ?
Le minimum, c’est d’abord qu’elles puissent avoir des réponses à leurs questions, notamment sur la vie amoureuse, le corps, la sexualité… Avec internet, elles peuvent aussi commencer à défendre leurs droits et agir en réseau. Dans la mesure où elles sont isolées, en tête à tête avec leur famille, comment peuvent-elles s’opposer au mariage par exemple ? Plan International a mis en place le programme Girls Out Loud dans 15 pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, projet piloté pour la première fois en Colombie. A travers un groupe Facebook, les utilisatrices ont accès à des informations vérifiées. Elles peuvent poser des questions, s’entraider et exprimer leurs attentes. Elles constatent parfois que leur cas est loin d’être unique… Mais idéalement, on ne devrait pas avoir à créer des groupes privés. Internet leur permet de forger leurs opinions, c’est un enjeu possible de leur militantisme.

Mais internet peut aussi être un espace de violences…
Dans le rapport, on relève qu’une fille sur quatre n’a pas assez d’assurance pour partager ses opinions : soit par peur de colporter de fausses informations, soit par crainte des « haters » en ligne. Les filles, parce qu’elles font face à des normes de genres néfastes, sont plus exposées au harcèlement en ligne. C’est aussi sur les réseaux sociaux que les femmes en politique sont très souvent dénigrées : on va commenter la manière dont elles sont habillées, mais très peu leurs propos… Ces discriminations et violences de genre en ligne peuvent freiner la participation des jeunes femmes. Elles se débrouillent seules, sont livrées à elles-mêmes. Comme pour la désinformation.

Quelles sont les conséquences des fake news sur les jeunes femmes ?
On ne parle jamais des effets spécifiques des fausses informations sur la vie des jeunes filles. Or elles doivent trouver les bonnes informations pour réaliser leur potentiel. Les réseaux sociaux sont leur média de référence. Si cette première source est erronée, elles ne s’émanciperont pas correctement. Plus de neuf filles sur dix se disent influencées par les informations qu’elles trouvent en ligne. Mais ce qui est inquiétant, c’est que seulement sept sur dix ont appris à repérer les fausses informations, que ce soit à l’école ou dans leur famille. Très peu de pays mettent en place des programmes d’apprentissage au numérique, alors qu’elles sont nombreuses à être préoccupées par la question des fake news.

L’enjeu n’est-il pas aussi de mieux intégrer les femmes dans les métiers du numérique ?
C’est l’autre versant du sujet. Au départ elles sont utilisatrices, mais on aimerait qu’elles deviennent conceptrices. Si les filles accèdent d’avantage aux filières technologiques, elles pourront changer ou créer les algorithmes. Mais cela veut dire que, dès l’école, on doit déconstruire les stéréotypes : une fille n’est pas uniquement dédiée aux métiers du soin. Elle peut être programmatrice informatique, et en a le même potentiel que les garçons.
https://www.liberation.fr/societe/droits-des-femmes/journee-internationale-des-filles-avec-internet-elles-peuvent-commencer-a-defendre-leurs-droits-20211011_3RIHFE4OUBER5HHICUZPR24OEA/

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